The Sounds inside my Mind

2 Octobre - 20 Novembre 2010

The Sounds inside my Mind – nous sommes l’objet de leur fan­tasme


The Sounds inside my Mind pro­pose de suivre le fil des affi­ni­tés, par delà les géné­ra­tions, entre les pro­duc­teurs d’uto­pies et ceux qui en inter­ro­gent le sou­ve­nir. Les œuvres his­to­ri­ques de Lygia Clark, Gordon Matta-Clark et Claude Parent ne for­ment ni groupe ni mou­ve­ment, mais ont exercé de la manière la plus radi­cale leur pou­voir de liberté. Chacun dans son domaine a dura­ble­ment contri­bué à la trans­for­ma­tion et à l’élargissement du champ de l’art.

Leurs pro­po­si­tions ont été de véri­ta­bles objets cri­ti­ques met­tant en crise des notions fon­da­men­ta­les de leurs champs res­pec­tifs. Le tra­vail de Claude Parent, par­tant d’une frac­ture de l’espace moderne, intro­duit avec la fonc­tion obli­que une notion qui n’a rien perdu de son pou­voir dés­ta­bi­li­sant. Vivre sur un plan incliné, pour Claude Parent c’est l’unique façon d’échapper à la ratio­na­lité moderne. Les sculp­tu­res à géo­mé­trie mani­pu­la­ble de Lygia Clark ne conçoi­vent plus l’œuvre sans l’apport de celui qui en mani­pule la forme : Les Bichos cons­ti­tuent une étape magi­que dans le che­mi­ne­ment de l’artiste jusqu’à un art tourné radi­ca­le­ment vers la sen­sa­tion au point de ne plus pro­po­ser d’œuvres mais des objets rela­tion­nels ser­vant à pro­duire des expé­rien­ces sen­so­riel­les. Les Anarchitectures de Gordon Matta-Clark, enfin, établissent l’espace social comme nou­velle échelle du tra­vail artis­ti­que. L’artiste choi­sit « de trai­ter direc­te­ment avec des condi­tions socia­les, par une impli­ca­tion phy­si­que réelle ou par l’impli­ca­tion directe de la com­mu­nauté concer­née ».

Ces tra­vaux occu­pent une place cen­trale dans la mytho­lo­gie des avant-gardes de la deuxième moitié du XXème siècle et les artis­tes contem­po­rains sont nom­breux à inter­ro­ger cet ins­tant his­to­ri­que et ses figu­res. Le ques­tion était au cœur du pro­gramme de la der­nière Dokumenta qui s’inter­ro­geait afin de savoir si la moder­nité était notre Antiquité. Et de nom­breux artis­tes n’ont pas fini d’appor­ter leurs répon­ses spé­ci­fi­ques. Une fas­ci­na­tion pour le code source et une démar­che sou­vent appa­ren­tée à l’archéo­lo­gie ou à l’anthro­po­lo­gie carac­té­ri­sent ces posi­tions artis­ti­ques. Carol Bove notait que les années 1960 et les années 2000 se carac­té­ri­sent par une fas­ci­na­tion mutuelle : « Nous sommes l’objet de leur fan­tasme ! J’aime­rais conclure des ‘tran­sac­tions’ com­men­cées alors et ceci d’une façon adé­quate mais qui ne vient ni expli­quer ni clore ces dos­siers défi­ni­ti­ve­ment ». Les tra­vaux de Leonor Antunes, ici en dia­lo­gue avec l’œuvre de l’archi­tecte et desi­gner Eileen Gray et les recher­ches de l’archi­tecte et plas­ti­cien Didier Faustino – dont, notam­ment, cer­tai­nes archi­tec­tu­res à valeur de mani­feste et pour ne citer que SQMH (one square meter house ins­tallé à la porte d’Ivry, Paris) - s’ins­cri­vent dans une pers­pec­tive simi­laire.

Le phé­no­mène est sans doute aussi com­plexe que dura­ble et de mul­ti­ples rai­sons sont à son ori­gine. C’est d’abord un phé­no­mène lié à la durée, à celle de la moder­nité dont l’his­toire ne cesse de s’écrire et à son effet, l’accu­mu­la­tion d’immen­ses archi­ves, là où devait régner le nou­veau. Et c’est, in fine, selon toute vrai­sem­blance, une réponse à la faible den­sité idéo­lo­gi­que d’une époque toute prag­ma­ti­que, son primat économique et de son hori­zon uto­pi­que réduit à zéro.